Bicilindrica
Publié le 22 Juillet 2013
De l'autre côté des Alpes, si on n'est pas toujours très doué pour la fiabilité, on l'est d'avantage pour imaginer, tester, optimiser des solutions innovantes et les abandonner dès qu'elles fonctionnent.
En témoigne la Moto-Guzzi 500 Bicilindrica qui règna sur la compétition moto pendant près de 18 ans. Né dans l'esprit de Carlo Guzzi en 1933, le premier modèle est le fruit de l'accouplement de deux monos 250 cm3. Alésage et course restent les mêmes que sur la 250, les bielles sont simplement modifiées afin de réduire la longueur du vilebrequin. Guzzi conserve les carters de la moto donneuse qu'il fait modifier et adapte certaines pièces aux contraintes augmentées par l'accroissement de la puissance. La partie cycle est également issue de la 250 mais obligera la marque à adopter une suspension arrière pour le plus grand bénéfice de la tenue de route et, conséquement, une augmentation de l'espérance de vie des pilotes.
En 1933, la 500 et son bicylindre en ouvert à 120° sortent 43 chevaux à la roue et permettent une vitesse de pointe de 186 km/h (à Monza, avec Moretti au guidon). En 1951, elle dépassait allègrement les 210 km/h pour une puissance supérieure à 50 chevaux, valeurs toutefois insuffisantes pour rivaliser avec les Gilera Bialbero et autres MV Agusta de l'époque.
Si cet engin a à ce point retenu mon attention, c'est au départ pour des raisons esthétiques : ce remarquable moteur très ouvert avec son cylindre arrière ailleté de manière à recevoir le flux d'air frais ; cet ensemble réservoir tête de fourche d'une seule pièce qui lui donne davantage l'air d'un poisson que d'un aigle ou d'un fauve prêt à bondir (analogie très en vogue ces derniers temps chez les designers en manque d'idées) ; le garde boue avec son dosseret intégré ; la curieuse silhouette, compliquée mais pourtant élégante de l'engin... Reste aussi la place qu'elle a occupé dans l'histoire motocycliste avec sa victoire au TT 1935 de Stanley Woods, les innombrables trophées du championnat italien avec le légendaire Omobono (quel prénom !) Tenni.
Evidement, comme la moto marchait bien, Moto-Guzzi s'est dépéché de passer à autre chose en développant un quatre en ligne longitudinal qui ne marchait pas et un V8 qui coutaît la peau des fesses. Après l'abandon de la compétition par marque en 1957, lorsqu'il s'est agi de concevoir un gros bicylindre routier, l'ingénieur Carcano a tout naturellement opté pour le V2 à vilo longitudinal qu'on connaît, enterrant définitivement le Védoué à l'ancienne mode dans les archives de Mandello.
Sammy Miller (?) en démo.
Omobono Tenni, ici au guidon d'un bicylindre (250 ou 500 ?), au Tourist Trophy de 1935.
Sources : les images proviennent de Flickr, les renseignements historiques de ce blog.